L'affaire ne cesse d'enfler, à tel point même que le ministre de l'Education nationale s'est vu contraint de réagir, dénonçant la mauvaise image que, selon lui, les profs qui ont participé à l'opération donnent de leur métier: j'ai une trop haute estime du professeur, de l'image du professeur, de ce qu'il représente dans notre pays et dans la République, pour accepter un tel dénigrement (...) Je suis choqué que l'on puisse porter atteinte à l'image même du professeur", a-t-il déclaré.
Il semblerait, en tout cas, que nombre d'internautes ne soient pas du tout de l'avis du ministre et que leur action destinée à appuyer leur Manifeste dénonçant le malaise général qui s'instaure de plus en plus dans l'Education soit plutôt populaire si l'on en juge aux 9236 signatures que cette pétiton a déjà attirées au moment où je commence à écrire cet article.
Il est vrai que rien n'est à retrancher de leur texte qui pose bien le sentiment général du monde enseignant sur la casse de leur métier et du sytème éducatif qui part de plus en plus à la dérive sous l'effet de réformes lancées à la va-vite, mal pensées, dont la mise en place n'est même pas cadrée et qui ont bien d'autres buts que pédagogiques.
Il n'est pas jusqu'au Haut-Conseil de l'Education qui dénonce les évaluations "trompeuses" du ministère pour faire croire à la réussite de sa politique et aux instances mondiales qui ne tirent la sonnette d'alarme sur le malaise français: http://blogs.lexpress.fr/l-instit-humeurs/2011/09/17/deux-rapports-tres-critiques-pour-la-politique-d%E2%80%99education-francaise/
Qui pourra sérieusement jurer que la disparition de l'histoire en terminale S, les bac pro réduits de 4 à 3 ans, la suppression de toute notation au profit de la seule évaluation par les compétences du socle commun, les heures de pseudo-soutien ou tutorat, le véritable saccage des programmes d'histoire et de géographie où raconter des histoires devient bien plus important que de comprendre l'histoire ( ex: la journée-type de Louis XIV - rejeté en fin de programme de 5ème - est peut être intéressante d'un point de vue anecdotique et pour montrer comment le roi est en représentation permanente, mais poser comme savoir que l'élève doit être capable de faire le récit de cette journée royale type laisse songeur sur la conception de l'histoire par ceux qui ont fait ces programmes; autre exemple: en quoi savoir "raconter la capture, le trajet et le travail forcé d'un groupe d'esclaves" est-il de l'histoire ? Quel que soit l'intérêt de la question, les enjeux de mémoire qui se cachent derrière, l'horreur intrinsèque de l'esclavage, faut-il pour autant substituer à une réflexion sur le sujet le registre de l'émotion par un récit appelant plus l'élève à dramatiser qu'à poser un regard distancié ?) sont de nature à améliorer la formation des futurs citoyens dont les profs ont la charge ?
Oui, qui pourra sérieusement penser que l'avenir de l'école est là ?
Mais de cela, Monsieur Châtel n'en a cure: seules comptent les économies que l'on peut faire, la politique de communication s'acharnant sur les profs "responsables" - et qu'on pénalisera, à droite comme à gauche, par un surcroît de travail sans les payer plus - et le trucage des chiffres, digne d'un régime totalitaire, où des commissions dites d'harmonisation, sont priées de falsifier massivement les résultats aux examens pour faire croire à la réussite de la politique gouvernementale et acheter la paix des familles.
Et ce ne sont pas les projets pour l'école de l'opposition socialiste qui vont rassurer: dans leurs grandes lignes, ce sont les mêmes que ceux de l'actuel ministre quoi qu'ils en disent par ailleurs sur les ondes. Supprimer des postes reste leur priorité absolue, quoi qu'il arrive.
C'est dire si la situation de l'éducation est grave dans notre pays et s'il est plus que temps de réagir pour empêcher sa casse complète.